On m’appelle Plume d’Argent

On m’appelle Plume d’Argent, j’ai 16 ans. 17 ans peut-être.
Mon nom vient de cette plume immortalisée sous la glace, que mon père à trouvé le jour de ma naissance.

Je suis l’aînée de 5 enfants. J’aide ma mère à prendre soin des petits, préparer les repas pour les hommes, coudre les peaux, monter les tipis, cueillir les plantes, surveiller les provisions d’eau.
Ma mère est une femme silencieuse.
Avec elle, j’écoute les sons de la nuit, je respecte la sagesse des anciens, je découvre les plantes et j’interprète les rêves.

De cette vie, j’ai beaucoup appris.

Mon père est le sage de la communauté. Il est aimé pour sa bonté et pour sa connaissance.
C’est un homme juste et droit, de cette droiture qui force le respect. Il marquera ma vie. Profondément.

On m’appelle Plume d’Argent.
J’ai 16 ans, 17 ans peut-être. Je viens de cette terre, aux pieds de la montagne. Cette terre qui nous accueille et qui nous aime.
Nos tipis se déplacent pour suivre les bisons.
Nous vivons en paix.


C’est la nuit. Tu es là. Pour le rassemblement des clans. Pour trois jours, tu es venu de loin.
Et les tambours qui chantent, et les tambours qui vibrent sous la nuit étoilée. Tout est simple.

Je te regarde. Assis. De l’autre coté du feu. Tu as le torse nu et des colliers ornent ton cou épais.
Le petit garçon, avec lequel j’ai joué quelques fois, est devenu un homme.
Je suis presque timide, il y a cet attrait que je ne connais pas.
Mon père qui est là, assis, calme, respecte la magie de l’instant.
On m’appelle Plume d’Argent, et cette nuit là, face à ce feu, sous le son lent des tambours, mon cœur s’est déployé.
Plus tard, allongée sur mon tapis, l’image de ton visage me hante. Tes yeux noirs, ton corps et ton énergie, tout me tient en éveil. Il y a dans mon ventre le rythme de terre-mère, qui vibre tel un battement de coeur. La nuit sera sans sommeil pour moi.

On m’appelle Plume d’Argent. J’ai 16 ans. 17 ans peut-être.
Il fait jour maintenant.
Je vais à la rivière pour prendre de l’eau. Et j’espère que tu seras là. Au bord de la rive je sens ta présence derrière moi. Mon cœur s’emballe. Et tu t’approches.
Il y a cette danse, comme deux animaux sauvages, cette valse maladroite. Et ce temps qui s’arrête. Ce temps qui s’étend pour accueillir la mélodie des cœurs.

Je me déplace et tu me suis.
Un pas en arrière et tu bondis.

Et cet arbre sur lequel je m’appuie. Recherchant son aide, dans ce moment que je ne connais pas.
Puis tu attrapes ma bouche. Tout s’accélère, et je ressens pour la première fois ton corps d’homme.
Il y aura les mouvements.
Quand on ne veut pas que cela s’arrête.
Ces mouvements créateurs. Ce plaisir nouveau, et la jouissance.
Il y aura ton souffle chaud sur ma peau et nos sueurs qui se mêlent.
Il y aura l’unité et l’amour.
Nous resterons là des heures, blottis, à contempler la rivière, sans un mot.


On t’appelle Pierre Tranchante le Matin.
Ce nom t’a été donné il y a deux hivers. Grâce à un exploit de chasse.
Le moment où le bison approche et que, plein de courage, tu te lances.
Grâce à toi, ta communauté aura de quoi survivre quelques temps.

On t’appelle Pierre Tranchante le Matin et tu ne repartiras plus. Mon clan deviendra le tien.


Le temps filera sa douce mélodie.
Sur ces terres vierges qui nous aiment.
La vie creusera ses rivières sur nos fronts.
Nos mains se coloreront d’avoir tant pris soin.

Tu seras celui qui chante le soir auprès du feu.
Tu seras celui que les enfants écoutent, celui qui guide et qui aime.
Je serai celle que l’on vient voir au matin pour les rêves.
Grâce aux rêves de la communauté nous saurons où aller chasser, quel esprit nous viendra en aide ou comment apaiser un cœur qui souffre.

Il y aura le partage des rêves dans le grand tipi blanc à chaque nouvelle Lune. Cérémonie.

Pas de grands exploits, rien d’extraordinaire.
Une vie simple.
Nous aurons 6 enfants, certains mourront, d’autres survivront.
Il y aura des peines, et il y aura des joies et toujours la droiture. A chaque instant.
Je t’aimerai chaque jour de ma vie. Je serai là, à tes cotés. Jusqu’à ce dernier souffle que j’accompagnerai d’un chant mélancolique.

Et cette fleur que je poserai sur ta bouche.


On m’appelle Plume d’Argent et de cette vie je me souviens.
Certains chants me traversent encore et en corps, défiant les lois de l’espace temps.

On m’appelle Plume d’Argent, j’ai 16 ans. 17 ans peut-être.
Et de cette vie….. Je me souviens.

Marjolaine Femme du Rêve
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